1 seule raison de proposer une application plutôt qu'une version mobile de son site

J’ai lu hier un article intitulé Internet mobile : 10 raisons de proposer une application plutôt qu’une version Web mobile de son site. Je passerai outre le « x raisons / meilleures applis / bla bla » dont l’intérêt a été usé par son usage.

Non, ce qui m’a vraiment frappé c’est que sur les 10 raisons évoquées, à peine 2 sortent la tête du lot :

  • utilisation du push
  • l’écosystème de l’App Store

Mais surtout, les véritables raisons ne sont même pas évoquées.
Rectification.

§Ces 10 raisons sont du bullshit

La grosse dérive de ces articles à base de n-raisons, c’est qu’on se sent obligé d’en pondre pour arrondir le compteur. Forcément, 2 raisons ça fait pas rêver.

Je vais revenir sur chacune de ces raisons de préférer une application à une version mobile :

  1. un format adapté
    Ça ne veut strictement rien dire : le site Web mobile et l’application peuvent avoir la même apparence et s’affichent dans le même espace disponible (à quelques détails près − les boutons de navigation par exemple).  L’application ne garantit par le rendu mais utilise bien souvent une charte de facto ; charte qui est rarement reprise pour les sites Web mobile et pour cause, ces derniers s’adressent à tous les mobinautes.
  2. une plus grande facilité d’utilisation pour le public
    Là encore il y a grosse confusion entre fond et forme. Un site Web mobile peut avoir la même apparence et le même type de navigation qu’une application. La preuve : l’application Facebook (pour Android en tous cas) renvoie régulièrement sur la version mobile (adaptée aux écrans tactiles) pour terminer certaines actions.
    En terme d’apparence, elles sont quasiment identiques. D’ailleurs, vu qu’il est impossible de consulter ses messages privés sur l’application, le site Web mobile est plus facile à utiliser que l’application.
  3. le grand public déteste les URL
    Il s’en fiche surtout, parce qu’il ne comprend pas. Donc bien souvent le nom du site est cherché dans le moteur de recherche par défaut du navigateur. Cela se termine par un ajout dans les favoris.
    Entre chercher un nom d’appli dans un store ou dans un moteur de recherche Web, il n’y a strictement aucune différence.
  4. le grand public adore les icônes
    Difficile de laisser échapper un sourire en lisant cette raison :-) Je cherche encore le rapport car des icônes, on peut en mettre à foison sur un site Web mobile.
  5. le push
    C’est quelque chose qu’on ne peut effectivement pas faire depuis un site Web mobile. C’est un avantage pour l’application. Combien de sites ont besoin de fournir du push ? Je n’imagine pas avoir 26 applications de blogs m’envoyer du push à chaque publication d’article. Donc à consommer avec modération d’autant plus que l’existence du push ne rend pas son utilisation obligatoire.
  6. le buzz
    Le buzz ne se fait pas par rapport à l’application mais aux fonctionnalités du service. Que je sache, je joue avec Foursquare, j’utilise Seesmic pour son widget Android et ses options poussées, pas parce que c’est une application ou un site Web. Foursquare serait pourri, l’application n’y changerait pas grand chose.
    Le buzz est possible mais ça concerne un nombre tellement faible de services (par rapport à l’ensemble des sites Web existants) qu’il ne faut pas espérer un buzz uniquement parce qu’une application existe.
  7. c’est bon pour ton image, coco
    Ne pas proposer une application pour un service à usage de masse est effectivement une erreur à l’heure actuelle. En revanche, c’est une décision stratégique qui n’empêche pas pour autant de disposer d’un site Web mobile. La raison est hors-contexte : ça se décide entre l’application et l’application.
  8. une application est plus facile à trouver qu’un site Web
    Cf. ce que j’ai écrit plus haut : chercher sur l’App Store ou sur Google, c’est pareil. En revanche, le réflexe de chercher dans le store sera probablement bien plus élevé. Ça n’ajoute aucune facilité. C’est juste une habitude différente − donc ce n’est clairement pas la même chose.
  9. une application offre des possibilités de fonctions plus avancées qu’une version Web mobile
    Oui, et le push en fait partie. Mais là encore, l’auteur de l’article n’a pas compris qu’un site Web est universel, à la différence de l’application qui est spécifique à la plateforme en question. C’est d’ailleurs pour ça que ça porte un nom différent, site Web, application.
    Encore que, avec des technos Web on peut réaliser une application mobile grâce à des outils comme PhoneGap.
  10. l’écosystème de l’App Store, iAd et la possibilité de monétiser une application
    C’est fortement lié à la 8ème raison : l’écosystème fait qu’on va chercher en premier dans le store plutôt que depuis son navigateur mobile. D’ailleurs, pour un service existant, les utilisateurs n’attendent même pas que la communication soit faite sur l’application : les possesseurs de smartphones cherchent dans le store. Point final.
    iAd n’est qu’une plateforme publicitaire parmi d’autres mais on n’a pas le choix (sur iPhone en tous cas).

La monétisation est possible en paiement à l’acte sur un site Web mobile, mais clairement pas à l’installation. La manière de monétiser est différente. L’acte d’achat aussi : l’utilisateur sera très certainement plus propice à payer une application qu’un accès à un site Web mobile.

§S’il ne fallait retenir qu’une seule raison

Quand même, je vais citer LA raison qui me fait utiliser une application plutôt qu’un site Web mobile : la vitesse. L’application ayant toute l’interface préchargée, la navigation est fatalement plus rapide.

Je pourrai quand même citer un excellent contre-exemple : le site Web mobile de Flickr. Sa navigation entièrement en Ajax (pour les mobiles supportant cela) la rend véloce et très agréable à utiliser. Elle est aussi rapide à consulter que l’application Facebook. Elle est même plus rapide en ce qui concerne le chargement d’images.

Écran de l

§Application ou site mobile ? Les deux mon capitaine !

Il faut quand même comprendre une chose : le choix ne se fait pas entre une application ou un site Web mobile.

Comme je l’expliquais avant, la cible est différente.
Quand je publie une application iPhone, le public est mécaniquement la population possédant un iPhone.
Quand je publie un site Web mobile, le public est mécaniquement la population connectée à l’Internet mobile, y compris les utilisateurs d’iPhone naviguant avec Opera Mini.

Le Web a une notion d’universalité que n’ont pas les stores. Un store, c’est un service Minitel 2.0. On se connecte au service et on n’en sort pas.
Ne pas proposer de site Web mobile, c’est nier une frange des internautes. Et ce n’est pas ce que j’appelle un progrès, l’exclusion.

Ah et dernier point : il n’y a pas que l’iPhone dans la vie. Il y a aussi Android, webOs et Windows Phone. Certes en Europe l’iPhone domine l’Internet mobile et le marché des smartphones mais ce n’est pas une généralité mondiale.

§Conclusion

La mobilité et le Web mobile sont des sujets très chauds et en pleine croissance. Ça serait bien d’arrêter de se secouer la nouille pour le bon plaisir des statistiques.

Vous pouvez proposer un site Web mobile.
Vous pouvez proposer une application mobile.

Vous n’avez par contre pas vocation ni obligation de sortir une application mobile pour y caser tous les buzzwords ou être hype. Un exemple ? L’application Agenda de la ville de Bordeaux. C’est une appli mais un chargement systématique de 10 minutes au lancement, c’est un non-sens complet.

Comme quoi, application ou site Web mobile, encore une fois, la clé du succès c’est une bonne conception et surtout une réflexion sur les apports à l’usager en situation de mobilité.