☕️ Journal : 38

Aujourd’hui, j’ai 38 ans — sans compter les 9 mois de gestation.

Je fuis l’idée de fêter mon anniversaire depuis l’adolescence. Parce que je n’aimais pas l’attention que ça portait sur moi. Les regards. Les attentes (“tu grandis, c’est bien”, etc.). J’ai eu honte de ça — qu’on puisse m’aimer, ou s’attarder sur moi.

Et pourtant, c’est ce que je souhaitais aussi — qu’on m’aime, qu’on s’attarde sur moi. Pour qui je suis ; pas pour qui on aimerait que je sois.


Elle m’a offert un petit soliflore en terre cuite.
Avant, j’aurais eu honte qu’on me fasse un cadeau.
À 38 ans, j’en ai les larmes aux yeux.

Parce que ce petit objet est là pour célébrer ma sensibilité au vivant, à la transformation du végétal quand l’eau n’est plus.


À 38 ans je me réveille à l’heure bleue.
Je termine de regarder XXY.
Je lis un mémoire sur les corps trans et intersexes sous le regard de metteur·ses en scène cisgenre, parce que je me demande si l’actrice qui incarne un personnage intersexe est elle aussi intersexe.


À 38 ans, je me réveille en colère comme à mes 16 ans.
J’aime vivre en aimant ce qui m’entoure, et je n’aime pas voir ce qui m’entoure détruit, “pour l’économie”, “parce que c’est comme ça”, ou “parce que ce n’est pas grave”.


Aujourd’hui, je m’offre une journée de soins avec moi-même, à faire ce que je veux, au rythme que je veux.

J’écoute et j’entends la petite voix qui dit que “ça, ça serait mieux” ou que “mais c’est rien de spécial”. Je l’écoute, et regrette de porter en moins cette “intégration”, des attentes que d’autres ont eu tant de mal à gérer avec elleux mêmes.