☕️ Journal : Danse libre

Je ne danse pas. Je n’ai jamais dansé. Je me suis toujours demandé pourquoi le corps des autres bougeait/avait envie de bouger sur de la musique. Et pourquoi cette musique ne m’agitait pas.

Je me suis inscrit à un stage de danse, de la “danse libre”. Danse singulière. Une danse guidée par son propre corps, et non par des codes. Pas de “il faudrait faire comme ci”, ou “ce mouvement est mieux”. C’est de l’impro, avec son corps. Des fois seul·e (enfin, tout un groupe simultanément). Des fois seul·e (enfin, devant tout le groupe qui te regarde).

J’avais terriblement peur.
Du regard des autres.
De mon propre regard.
De mon propre corps.


En regardant le corps comme une mémoire, une pile qui accumule les expériences sous forme de sensations, j’ai pu remonter à certains souvenirs. Des souvenirs où j’ai enregistré des messages comme des interdictions, comme du danger. Des messages sous forme de silence, de cris, de punition, d’interdit.

Interdit d’en parler, interdit de montrer, interdit de questionner. Seules restent les pensées. Et le corps comme muraille à ne pas franchir.

J’ai alors réalisé que le fait de ne plus vouloir chanter à l’église était à la fois le refus d’un chantage affectif, et un moment où j’avais décidé de sceller mes pensées, envies et désirs sous ma peau.

Rien n’en sortirait, je ferai comme les autres, pour ne pas attirer l’attention.


(Re)mettre le corps en mouvement, sous le regard de ce que je me suis interdit, ça a forcément secoué mon système mental. Que c’est un non-choix : un choix pour être tranquille, mais pas un choix par conviction.


Ce sentiment de honte reviendra.
Mais j’espère à chaque fois faire appel à mon bassin, qui se mettra en mouvement en écoutant un truc connu ou inconnu à la radio.

Je sentirai ces mouvements, le tissu qui court sur la peau, les vibrations des os qui exercent une rotation, les organes qui se coulent dans leur enveloppe.

Et le regard, mon regard qui s’observe.