Pourquoi j'ai décidé de devenir indépendant ?

On ne décide pas de quitter son travail ou de tourner dos au salariat du jour au lendemain. Est-ce parce que l’herbe est plus verte ailleurs ? Qu’on cherche à changer d’air, d’orientation ou afin de percevoir une rémunération mieux adaptée à son travail ?

Devenir indépendant est-il un passage obligé ou une tentative désespérée d’atteindre une liberté promise, s’éloignant au fur et à mesure que l’on s’en rapproche ?

Dans mon cas, puisque je ne peux parler que de mon expérience avec la création de CyneticMonkey. Les réponses se trouvent dans le passé, mon caractère et mes objectifs, tant professionnels que personnels.

§Rendons à César …

Puisqu’il faut un début à toute histoire, commençons par là. Si ma vie n’a pas démarré chez Clever Age, c’est en tous cas dans cette entreprise que j’ai pu m’y accomplir le plus, professionnellement parlant. Les composantes sont multiples : les échanges avec les collaborateurs, les lignes de code lues et produites, les projets gérés autant que les problématiques des clients, toutes plus uniques les unes que les autres.

3 ans de travail dans une ambiance agréable, dans un esprit d’ouverture, forcément ça laisse des traces. Les expériences forgent, en bien. Toute situation, y compris désagréable, m’aura davantage apporté que retiré.

J’ai d’autant plus apprécié la chance que m’a offerte cette entreprise, jusque dans l’accompagnement dans mon départ, en me permettant de partir avec l’indemnisation ARE de pôle emploi. J’eus entendu à Web2Connect que pôle emploi est le premier investisseur en France. Je confirme que bénéficier de 15 mois de trésorerie sur son salaire est vraiment confortable, autorisant une montée en puissance progressive.

§Pour aller où ?

Aussi paradoxal que cela puisse être, il y a à peine plus d’1 an de cela, en janvier 2010, je ne me voyais ni partir de l’entreprise, ni monter ma propre société.

À vrai dire, si je devais partir, je ne voyais qu’une entreprise où aller ; à moins de repasser du côté d’un service interne, dans une optique de produire et améliorer l’outillage Web. Parce que je crois en cette idée que le Web est une plateforme, d’échange, de développement et de mise en commun : individus, idées, code, etc.

§Le déclic

Pourtant, au fur et à mesure, un doute me prend, persiste et croît au point de ne plus quitter mon esprit. Vous savez, ce genre d’idées dont on ne se défait pas tant qu’on n’est pas passé à l’action. Ce genre d’idées où avec le recul, je sais que j’ai toujours pu m’y fier ; la seule occasion de m’en être abstrait n’ayant été au final qu’un boulet traîné pour une décision reportée.

Je confronte mon doute avec d’autres indépendants : leur bilan est positif, leur expérience rassure les clients, leur vie n’a cessé de gagner en qualité et ils ne sont pas pour autant aliénés à travailler le week-end ou au point de s’empêcher de partir en vacances de peur de laisser leurs clients derrière eux.

En fait, à chaque question que je leur posais, je me prenais conscience de la réalité et qu’au-delà de se jeter à l’eau, c’était vraiment ce que je recherchais. Pas une liberté utopiste où je faisais ce que je voulais, mais une philosophie de vie et de travail dans laquelle j’avais tout à gagner, car correspondant à mes aspirations.

Et ça, ça dépend vraiment de tout un chacun.

§Envie d’expérimenter

L’expérimentation couvre plusieurs domaines : de la relation client à la manière de gérer les projets, ainsi que les outils de production … jusqu’aux projets. Systématiser le travail avec les développeurs Open Source, et reverser le code pouvant l’être par exemple. M’impliquer sur des projets locaux (type OpenData) parce que je n’ai plus qu’à être d’accord avec moi-même, mon emploi du temps (et mes contraintes financières).

J’avais envie de voir si j’étais capable d’être à la fois souple et réactif, suffisamment clairvoyant dans ma disponibilité et régulier dans mes rentrées d’argent. À vrai dire, si je gagne suffisamment pour me payer et que la boutique tourne, je ne demande pas mieux. Aller chercher la performance (financière) à tout prix est à mon avis un facteur plongeant encore plus la tête dans le guidon, réduisant le recul et la créativité possible.

Dans l’expérience, j’ai aussi envie de lancer à terme quelques services, pour répondre à un manque et aussi générer des revenus cycliques.
Bref, du vrai projet à marketer sous peine d’avoir perdu du temps, mais appris techniquement dans tous les cas.

§Sortir d’une zone de confort

Le plus dur néanmoins est d’accepter de vouloir sortir de sa zone de confort.

En étant indépendant, je considère qu’on n’a plus de parachute, qu’il soit financier, technique ou en terme de gestion. Si je me plante, c’est ma faute, uniquement ma faute et j’y perds ce que j’engage : ma crédibilité, mon argent et l’énergie que j’aurais investi à construire ce en quoi je crois.

Ce n’est clairement pas ce qui m’a poussé à devenir indépendant. En revanche c’est un défi que je veux relever, même s’il me fait peur et que oui, ma vie aurait été plus tranquille et facile avec quelqu’un (responsable d’agence, commercial etc.) pour penser à ma place ou déblayer le terrain avant de rentrer en jeu (l’allusion au sport collectif est voulue).
C’est une manière pour moi de voir si je suis aussi à l’aise en première ligne qu’au second plan, à attendre et exécuter en étant protégé de l’environnement extérieur.

§Un choix de vie personnelle

Dernier critère à prendre en compte, celui du choix personnel : mon choix de vie. Il se trouve que je souhaitais revenir à plus de simplicité, moins de dépenses et me focaliser sur l’essentiel.

À vrai dire, la perte sèche de 42% de mon salaire net ne m’a pas laissé le choix : cela m’a juste facilité la tâche, laissant le porte-monnaie compléter ces objectifs.

Certes, cela se traduira dans un premier temps par moins de vacances, moins de cadeaux et moins de sorties. Toutefois j’estime que l’expérience en vaut le détour. Je ne dis pas que tout le monde doit faire ainsi. Je souhaite juste expérimenter, en restant à la limite du danger et en misant sur la (ma) réussite.

Je peux me tromper − la peur de sombrer dans une spirale infernale m’aide à conserver une certaine lucidité quant à ce choix.

§Conclusion

Avec le recul et en ce qui me concerne, je me rends compte que la décision de l’indépendance sont avant tout une histoire de parcours, d’expérience et de convictions.

Je pense que je n’aurais pas eu l’idée de me lancer dans cette aventure si je n’avais pas eu un sentiment de confiance suffisant, un réseau de contacts générateur de travail ou encore un niveau de connaissances nécessaire à une autonomie financière, administrative et technique.

Quoiqu’il arrive, je sais que j’y gagnerai, professionnellement et personnellement. J’espère pouvoir en faire profiter mes clients et mes camarades de travail. Je sais que ça ne sera pas tous les jours évident tout comme je ne sais pas davantage où je serai dans 1 an, 3 ans ou 5 ans.

Je sais juste que je m’en souviendrai et que je ne devrais pas regretter pas mes choix.
Et vous, les indépendants, y’a-t’il eu d’autres raisons qui vous ont emmené à vous mettre à votre compte ?