☕️ Journal : Après vous

Je suis sur un quai de gare, face au train qui vient d’arriver. Il s’est fait attendre 50 minutes. La masse s’infiltre petit à petit par la petite ouverture que représente la porte de la rame de train.

Je le vois venir de loin. Ou plutôt, je l’entends :

Oui, je sais.

Il est à 20 mètres, sur ma gauche, et pourtant sa voix porte au-dessus de tout le monde. Je ne sais pas ce qu’il sait, et je sais qu’il ne sait pas. Quelque part dans son ton, j’entends de l’inquiétude. Je l’oublie aussitôt. L’oubli en tant qu’acte volontaire, au même titre que “voulez-vous vider la corbeille ?”.

Je me suis rapproché de l’entrée, et je sens l’homme dans mon champ de vision, à gauche, en périphérie. Je le suis du regard, passer “tranquillement” devant les gens, une personne à la fois. Je capte les regards stupéfaits. Il me passe devant. Il passe devant la personne devant moi. Il passe devant la personne encore devant.

Au moment d’entrer dans la rame du train, il s’arrête, jette un regard à la personne qui est à sa hauteur, une femme, et lui dis :

Montez, je vous en prie.


Sa femme arrive à mon niveau, elle peine à comprendre pourquoi son mari s’inquiète autant de monter dans le train.

Je la sens éteinte, fatiguée par la vie, et surement son mari.
Il est monté, elle reste derrière.